Cent espèces d’abeilles sauvages peuplent la grande Cariçaie (CH)
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Lac de Neuchâtel Un recensement réalisé en 2014 a permis de les identifier. Seules 23 étaient connues jusqu’alors.
En se promenant le long de la rive sud du lac de Neuchâtel, il y a cent fois plus de chances d’observer une abeille sauvage qu’une abeille domestique.C’est ce que l’on peut déduire du recensement réalisé l’an dernier par l’Association de la Grande Cariçaie. Alors qu’il n’existe qu’une espèce d’abeille domestique (l’abeille dite « mellifère », qui produit le miel), ce ne sont pas moins de 100 espèces dont la présence a été prouvée par cette action. Une diversité qui représente le sixième de la communauté des abeilles sauvages de Suisse, au nombre de 650.
« Nos réserves en abritent donc bien plus que ce que nous savions »
« Nos réserves en abritent donc bien plus que ce que nous savions, puisque nos connaissances faisaient état de 23 espèces différentes », souligne Antoine Gander, collaborateur scientifique de l’association. Si la Grande Cariçaie et ses milieux humides ne sont pas à proprement parler un endroit privilégié pour ce type d’invertébrés, cette variété est un bon indicateur de la diversité du milieu naturel. « Nous avons une quantité de bois morts et des zones de sable où certaines abeilles construisent leur nid », reprend Antoine Gander.
Pas sûr cependant que le simple promeneur s’en rende compte par lui-même. Déjà parce que certaines sont plutôt difficiles à reconnaître. « Nous n’avons pas pu déterminer toutes les espèces avec précision. C’est le travail auquel s’attache aujourd’hui un spécialiste de l’Université de Neuchâtel. »
Pas de miel et solitaires
De plus, certains membres de la grande famille des apidés (20’000 représentants à l’échelle mondiale, dont un certain nombre de bourdons) ressemblent davantage à une mouche qu’à l’image qu’on se fait d’une abeille. De tailles diverses – elles mesurent de 2 mm à 2 cm pour certains bourdons –, elles peuvent être très noires, très jaunes ou encore plus ou moins poilues. Mais elles présentent toutes un point commun : contrairement à leur cousine domestique, les abeilles sauvages ne produisent pas de miel, bien qu’elles se nourrissent aussi du nectar des fleurs et participent à la pollinisation. Autres différences majeures : elles sont pour la plupart solitaires et n’ont ni relation sociale ni organisation hiérarchique.
De belles découvertes
Cet inventaire a réservé d’autres bonnes surprises. Parmi les nombreuses espèces dont ils ignoraient la présence, plusieurs sont en voie de disparition à l’échelle nationale, voire européenne. C’est le cas d’un bourdon, scientifiquement désigné comme Bombus muscorum, relativement rare en Suisse, très menacé dans la plupart des pays européens. Le vrombissement de ses ailes n’avait plus été détecté à l’ouest de Lucerne depuis des années. « Nous avons aussi découvert une abeille-coucou », souligne Antoine Gander. Une espèce qui, comme son nom le laisse supposer, parasite le nid d’autres abeilles. Son unique station connue jusqu’alors se situe en terre uranaise, au sud du lac des Quatre-Cantons.
« Responsabilité »
Outre la mise à jour de sa connaissance du terrain, ce recensement va orienter en partie le travail futur de l’association. « Nous aurons une responsabilité patrimoniale sur certaines espèces. Et peut-être devrons-nous approfondir nos recherches sur une ou deux espèces dont l’importance est nationale, voire supranationale, afin de mieux connaître l’état de leur population », souligne le biologiste.
Ce recensement représentant un premier état des lieux, il n’est pas possible d’en tirer quelque conclusion. Un même échantillonnage sera réalisé à nouveau dans dix ou vingt ans, à partir duquel des comparaisons seront possibles sur l’évolution de ces espèces. (TDG)